Auteurs(trice)
Associée, Litiges, Toronto
Associé, Litiges, Montréal
Associé, Litiges, Toronto
Associée, Litiges, Vancouver
La responsabilité du fait du produit évolue au Canada, et l’intervention gouvernementale augmentera probablement en 2025 et au-delà. Ce changement est favorisé par de nouvelles dispositions législatives qui autorisent les gouvernements à intenter des poursuites en vue de recouvrer les coûts des soins de santé associés à divers produits et services. En règle générale, ces dispositions législatives suppriment les obstacles juridiques traditionnels aux verdicts de responsabilité, comme l’obligation de prouver la causalité, prévoient des formules pour éliminer les calculs coûteux en temps de dommages-intérêts et restreignent la défense fondée sur la prescription. De récentes initiatives législatives témoignent de la volonté des gouvernements d’étendre ce type de législation au-delà du tabac et des opioïdes, que ciblaient les premières lois de ce type.
Un environnement réglementaire plus actif entraînera également plus de réclamations de la part des consommateurs. Par exemple et comme nous l’avons écrit en 2023, les rappels volontaires de produits, en réponse à d’éventuelles préoccupations en matière de sécurité, alimentent les actions collectives même en l’absence d’un préjudice véritable. Bien qu’une telle action collective ait été rejetée dans une décision récente de la Cour d’appel de l’Ontario, les avocats des demandeurs sont susceptibles de se réorganiser et de continuer à présenter les réclamations des consommateurs à la suite des rappels.
Les entreprises doivent renforcer leurs stratégies de conformité et de communication pour s’adapter à ces évolutions.
Réclamations gouvernementales fondées en droit en vue de recouvrer les coûts des soins de santé
Des entreprises de nombreux secteurs peuvent faire l’objet de poursuites judiciaires intentées par un gouvernement en vue de recouvrer les coûts des soins de santé liés à une vaste gamme de produits et d’activités. Des gouvernements provinciaux partout au pays ont adopté des lois « spéciales », qui prévalent habituellement sur les délais de prescription prévus par la loi et s’appliquent rétroactivement. Autrement dit, on pourrait poursuivre des entreprises pour des activités menées il y a des décennies et les exposer à des risques pendant des années.
Les entreprises doivent renforcer leurs stratégies de conformité et de communication pour s’adapter à ces évolutions.
Ces dispositions législatives font également pencher la balance en faveur des gouvernements à bien des égards, notamment en établissant la présomption que le produit cause les préjudices physiques et mentaux allégués et en créant des formules pour déterminer le montant des dommages-intérêts en fonction de la part du marché.
Cette tendance législative a commencé il y a des décennies, avec le tabac. Bien des provinces ont promulgué des lois spéciales visant à recouvrer les coûts des soins de santé pour les préjudices causés par le tabac. Cette tendance s’est ensuite étendue aux opioïdes.
Le recours à ce mécanisme législatif par le gouvernement risque maintenant de se propager à d’autres secteurs. Parmi les futures cibles potentielles figurent, entre autres, les entreprises qui œuvrent dans les médias sociaux, le jeu, la santé et la beauté, les produits ménagers, les aliments et boissons, les produits récréatifs et de conditionnement physique, ainsi que la fabrication et la distribution de produits médicaux et pharmaceutiques. À mesure que les coûts des soins de santé augmentent, les gouvernements cherchent de plus en plus à les recouvrer auprès des participants du secteur.
Une étude de cas : le projet de loi 12 de la Colombie-Britannique
L’effort le plus porteur à ce jour a été le projet de loi 12 de la Colombie-Britannique, la Public Health Accountability and Cost Recovery Act. Bien que ce projet de loi n’ait pas été adopté avant les élections provinciales de cette année, son dépôt témoigne d’un changement important en matière de risque pour les entreprises canadiennes. Nous nous sommes étendus sur ce projet de loi lorsqu’il a été présenté pour la première fois.
Le projet de loi 12 était particulièrement digne de mention parce qu’il proposait de conférer au gouvernement des avantages sans précédent en matière de litige, en lui permettant d’intenter des poursuites en vue de recouvrer les coûts des soins de santé associés à un large éventail de produits et de services, même si les entreprises se conformaient aux lois et aux règlements en vigueur. Le projet de loi avait une portée suffisamment vaste pour s’appliquer à pratiquement tous les produits et services associés à des risques pour la santé physique ou mentale. S’il avait été adopté, il aurait permis au gouvernement de justifier ses coûts en présentant des « certificats du ministre » plutôt que des éléments de preuve, un avantage important et sans précédent.
Bien que le projet de loi soit mort au feuilleton au moment où l’élection a été déclenchée, il est probable que des projets de loi semblables ressurgissent d’une manière ou d’une autre.
Rappels de produits et augmentation des litiges
Au Canada, les rappels volontaires de produits sont devenus un point de mire pour les actions collectives.
De nombreux demandeurs canadiens ont tenté d’obtenir des dommages-intérêts importants auprès d’entreprises. Dans bon nombre de ces affaires, les demandeurs ont allégué des dommages physiques et des « chocs » psychologiques liés aux rappels de produits qu’ils ont utilisés.
Un exemple notable est l’affaire Palmer v. Teva Canada Limited, une récente action collective liée au rappel mondial du valsartan. Les réclamations des demandeurs portaient entre autres sur le risque accru de cancer à l’avenir, les coûts de surveillance médicale, le remboursement du coût des médicaments consommés, les coûts des médicaments mis au rebut, les préjudices psychologiques et les dommages-intérêts punitifs. La Cour d’appel de l’Ontario a refusé de certifier l’action collective proposée, statuant qu’en l’absence de préjudice véritable, il n’y avait pas de cause d’action en négligence valable sans dommages réels. Cette décision fait ressortir les défis traditionnels que doivent relever les demandeurs consommateurs pour prouver le préjudice causé par un rappel de produit. Osler représentait Teva Canada Limitée dans cette action.
Bien que certains défendeurs aient eu gain de cause dans certaines actions collectives concernant un rappel, les avocats des demandeurs sont susceptibles de peaufiner leurs stratégies et de présenter des réclamations plus ciblées. Par conséquent, les entreprises doivent se préparer à une nouvelle vague de litiges et évaluer de façon proactive les répercussions potentielles de tout rappel de produit.
Préparer l’avenir
Les entreprises doivent investir dans des stratégies globales de rappel et de communication qui sont en adéquation avec leurs moyens de défense en droit. Elles doivent également effectuer régulièrement des évaluations des risques, notamment concernant la vulnérabilité des produits et des chaînes d’approvisionnement. Il est important de se tenir au courant de la réglementation de Santé Canada et d’autres organismes de régulation.
Les entreprises doivent aussi mettre sur pied de solides programmes de conformité et d’évaluation des risques, notamment en suivant l’évolution de la documentation scientifique, médicale et commerciale, ainsi que les commentaires sur les médias sociaux concernant les préjudices potentiels liés aux services et aux produits. Elles doivent continuer d’investir dans des programmes de formation afin de tenir leurs équipes au courant.
Apprenez comment l’équipe du groupe Responsabilité du fait du produit d’Osler peut aider votre organisation à atténuer les risques et à gérer les différends.
En savoir plusLes entreprises doivent envisager d’être proactives en communiquant régulièrement et ouvertement avec les organismes de réglementation et les législateurs. La collaboration avec les décideurs témoigne d’un engagement à être un bon citoyen social et peut offrir un accès privilégié aux modifications législatives et réglementaires proposées touchant les produits et les obligations de conformité.
Les participants du secteur doivent disposer de procédures claires et complètes s’ils veulent répondre aux enjeux entourant leurs produits et leur chaîne d’approvisionnement, notamment lorsqu’il s’agit de transmettre les mauvaises nouvelles à un niveau supérieur et lancer un rappel. Une communication claire avec le public est essentielle. Des stratégies de communication bien définies permettent d’intervenir rapidement pour faire face aux risques. Elles doivent être en adéquation avec des mesures proactives de défense en droit, comme les remboursements immédiats et les programmes de réclamation.
Enfin, les entreprises doivent envisager d’élaborer un plan d’urgence en cas de litige, notamment en mettant sur pied des équipes d’enquêteurs, de communicateurs et de juristes qui sont prêtes à répondre aux réclamations. Des litiges sont à venir dans bon nombre de secteurs. Que le demandeur soit un gouvernement, un organisme de réglementation ou un consommateur, les entreprises qui prennent des mesures proactives dès maintenant seront mieux placées pour atténuer les risques et gérer le litige le moment venu.