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Associé, Fiscalité, Toronto
Le 14 juin 2021, le Canada et l’Union européenne (UE) ont annoncé un nouveau partenariat stratégique concernant les chaînes d’approvisionnement en minéraux essentiels. Cette annonce fait suite au récent Sommet des dirigeants Canada-Union européenne. Ainsi, de nouvelles occasions d’affaires pourraient s’offrir aux entreprises canadiennes sur le marché unique européen. Elle est également révélatrice du rôle croissant que les tensions géopolitiques jouent dans l’institutionnalisation des relations bilatérales dans le commerce international.
L’économie mondiale étant en transition vers un modèle à faibles émissions de carbone et davantage virtuel, le partenariat constitue donc une tentative de mise en place de chaînes d’approvisionnement en minéraux et métaux qui seront essentiels à la fabrication de pointe. Ainsi, les gouvernements canadien et européens tentent surtout de diversifier leur dépendance économique – notamment envers la Chine qui a déjà fourni quelque 98,5 % des éléments de terres rares à l’UE; l’Europe demeure d’ailleurs une destination d’exportation clé pour les matières premières canadiennes – et de se tourner vers des alliés plus traditionnels. Lors de la conférence de presse conjointe qui a suivi le Sommet des dirigeants, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a expressément déclaré que cette diversification était l’un des principaux objectifs de l’UE dans le cadre du partenariat.
Ce partenariat a été conclu après que des rapports ont révélé, plus tôt cette année, que la Chine envisageait de restreindre ses exportations d’éléments de terres rares aux pays qu’elle considère comme une menace pour sa sécurité nationale, soulignant ainsi la vulnérabilité potentielle de la chaîne d’approvisionnement.
Le partenariat fait également suite au lancement du plan d’action en faveur des matières premières critiques de la Commission européenne en septembre 2020. Ce plan vise à garantir la résilience des chaînes d’approvisionnement en minéraux essentiels, notamment en ajoutant le Canada à la liste des « pays riches en ressources » présentant « un énorme potentiel inexploité pour la mise en place de partenariats durables et responsables ».
À l’annonce de ce partenariat stratégique, la présidente von der Leyen a également exprimé l’espoir commun des partenaires, soit que cette alliance favorise la durabilité, réduise les dommages environnementaux et augmente la transparence des conditions de travail. En outre, la collaboration sur les plans scientifique, technologique et de l’innovation, ainsi que l’élaboration de normes environnementales, sociales et de gouvernance, seront au cœur même du cadre de ce partenariat, publié le 21 juin 2021. Cela vient sous-tendre l’objectif global qui consiste à créer des chaînes de valeur résilientes et intégrées pour les matières premières. Le cadre proposé pour le partenariat stratégique est présenté ci-dessous.
Cadre du partenariat stratégique sur les matières premières |
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Objectif global Faire progresser la valeur, la sécurité et la durabilité du commerce et de l’investissement dans les matières premières résilientes et les chaînes de valeur en aval au Canada et au sein de l’UE |
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Aspects |
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Intégration des chaînes de valeur des matières premières entre le Canada et l’UE |
Collaboration sur les plans scientifique, technologique et de l’innovation |
Normes et critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) |
Objectifs |
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Réunir les investisseurs (y compris les utilisateurs finaux des matières premières essentielles) et les promoteurs de projets liés aux matières premières, partager l’information sur les possibilités, repérer les investissements privés et publics et les diriger vers un pipeline de projets de divers stades de la chaîne de valeur des matières premières. |
Collaborer avec le secteur et autres parties prenantes pour faire progresser la recherche et l’innovation sur les chaînes d’approvisionnement en matières premières essentielles, dont l’extraction et le traitement de ces matières à partir de gisements de minerai économiques à faible empreinte et à courant de déchet réduit, en soutenant la durabilité et la circularité de la chaîne de valeur de bout en bout. |
Prendre l’initiative en faisant valoir des références ESG de classe mondiale dans une chaîne de valeur de matières premières essentielles intégrée entre le Canada et l’UE, tout en défendant dans les forums multilatéraux des pratiques internationales solides et efficaces. |
Parallèlement à l’Accord économique et commercial global (AECG) (qui régit les échanges commerciaux entre le Canada et l’UE depuis 2017), ce nouveau partenariat pourrait ouvrir la voie à une panoplie de possibilités pour les entreprises canadiennes qui cherchent à implanter leurs activités sur le marché unique européen, notamment dans le secteur de l’extraction. Bien que les détails de la mise en œuvre du partenariat ne soient pas encore définis, les entreprises spécialisées dans la logistique des chaînes d’approvisionnement, les services-conseils en matière de durabilité et l’extraction des ressources devraient rester attentives à toute incitation bilatérale qui pourrait découler des objectifs décrits dans le tableau ci-dessus.