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Associé, Droit des sociétés, Toronto
Associé, Droit des sociétés, Toronto
Au Canada, les regroupements d’entreprises sont généralement appelés « fusions » ; toutefois, cette abréviation masque le fait qu’en droit des sociétés canadien, contrairement à l’état du Delaware, le concept de « fusion » n’existe pas. Au contraire, les lois canadiennes sur le droit des sociétés prévoient plusieurs possibilités pour effectuer une « fusion », y compris les regroupements de sociétés (fusions), qui sont généralement considérés comme l’équivalent fonctionnel des fusions du Delaware.
Une récente décision de la Cour supérieure du Delaware (la Cour) rappelle utilement qu’il existe des différences importantes entre une fusion canadienne et une fusion du Delaware, qui peuvent influer sur l’interprétation des contrats et le montage des opérations.
Dans l’affaire MTA Canada Royalty Corp v. Compania Minera Pangea, S.A. de C.V., la conclusion de la Cour selon laquelle une fusion canadienne avait le même effet juridique qu’une fusion effectuée dans le Delaware a entraîné le rejet de la demande de réparation du demandeur.
La décision portait principalement sur l’interprétation d’une clause d’interdiction de cession figurant dans une convention d’acquisition régie par la loi du Delaware, qui interdisait au demandeur de céder la convention ou une partie de ses droits, intérêts ou obligations, « par effet de la loi ou autrement », sans le consentement écrit préalable du défendeur. Selon les lois du Delaware, dans le cadre d’une fusion dans laquelle une entité est désignée comme « entité issue de l’opération » et l’autre cesse d’exister, une telle interdiction de cession s’applique généralement lorsque le cocontractant est l’entité issue de l’opération dans la fusion.
Le demandeur a reconnu — et la Cour l’a accepté — qu’une fusion régie par le droit canadien entreprise par le demandeur correspond à une fusion en vertu du droit du Delaware et, plus précisément, que la participation du demandeur à la fusion était analogue à la participation de l’entité absorbée à une fusion. Ainsi, la Cour a reconnu que la fusion avait entraîné la disparition de l’entité qui était partie à la convention d’acquisition. La fusion constituait donc une cession de plein droit de la convention d’acquisition, et était frappée de nullité en raison de la clause d’interdiction de cession. Par conséquent, la Cour a rejeté la demande du demandeur.
Les fusions canadiennes ne mettent fin à l’existence d’aucune des entités parties à la fusion ni n’entraînent la création d’une entité entièrement nouvelle. Au contraire, comme le juge Dickson de la Cour suprême du Canada l’a déclaré dans l’affaire R. c. Black & Decker Manufacturing Co., la personne morale fusionnée est semblable à « une rivière qui part du confluent de deux cours d’eau ». Le juge Dickson a distingué les fusions des autres formes d’acquisition et a observé que les fusions sont entreprises « généralement dans le but exprès d’assurer la continuité d’existence des compagnies constituantes ». La législation canadienne du droit des sociétés renforce l’analyse du juge Dickson. En outre, la Business Corporations Act de la Colombie-Britannique — qui est la loi en vertu de laquelle la fusion en question a été réalisée — prévoit expressément qu’une fusion ne constitue pas une cession de plein droit.
La décision dans l’affaire MTA Canada Royalty semble avoir été motivée par une compréhension erronée de l’effet d’une fusion canadienne. Si la Cour avait eu une idée plus claire de l’effet d’une fusion sur les entités parties à la fusion, elle aurait peut-être formulé une conclusion différente. Plus généralement, la décision de la Cour rappelle que des différences subtiles, mais essentielles, entre les fusions du Delaware et les fusions canadiennes peuvent influer sur les droits contractuels des parties et doivent être prises en compte lors de l’exercice d’une vérification diligente et du montage des opérations transfrontalières.