Auteurs(trice)
Associé, Droit municipal, aménagement du territoire; Immobilier, Toronto
Sociétaire, Litiges, Toronto
Associée, Litige; Affaires réglementaires, Autochtones et environnement, Toronto
Le 1er juin 2021, l’Ontario a ouvert les portes à un nouveau « super » tribunal constitué pour entendre les questions portant sur l’aménagement du territoire et la protection de l’environnement en Ontario : le Tribunal ontarien de l’aménagement du territoire. En vertu de la Loi de 2021 sur le Tribunal ontarien de l’aménagement du territoire (la Loi), cinq tribunaux existants, le Tribunal ontarien de l’aménagement du territoire, la Commission de négociation, la Commission des biens culturels et le Tribunal des mines et des terres (collectivement, les Anciens tribunaux) fusionneront pour former le TOAT.
Dans le présent bulletin, nous soulignons les répercussions de la Loi et de la création du TOAT, qui a reçu la sanction royale au début du mois de mai par son inclusion dans le Projet de loi omnibus 245, Loi de 2021 visant à accélérer l’accès à la justice (Projet de loi 245).
Le Tribunal ontarien de l’aménagement du territoire
Chacun des Anciens tribunaux entendait des questions portant sur des sujets différents. Toutes ces questions seront désormais entendues par le TOAT. Le TAAL, par exemple, entendait surtout des questions portant sur l’aménagement du territoire et certains aspects de la conservation du patrimoine et des expropriations alors que le TE entendait des appels et des demandes relatifs à des ordonnances d’assainissement de l’environnement et à des licences et permis environnementaux, entre autres.
La Loi prévoit le processus par lequel les Anciens tribunaux fusionneront pour former le TOAT.
Voici les principales répercussions de la création du TOAT :
- Les membres actuels des Anciens tribunaux continueront d’être des membres du TOAT jusqu’à l’expiration de leur mandat.
- Les membres du TOAT continueront d’être nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, qui désignera également un président et des vice-présidents parmi ces membres.
- Le président désigné du TOAT supervisera et dirigera les affaires du TOAT. Il nommera aussi les membres du TOAT qui présideront les travaux.
Voici certaines répercussions relatives à la procédure :
- Le TOAT aura la compétence exclusive sur toutes les affaires étant du ressort des Anciens tribunaux. Il déterminera notamment toutes les questions de loi et de fait et il aura le pouvoir de rendre des ordonnances, de donner des directives et d’imposer des conditions à cette fin.
- Le TOAT peut adopter des pratiques et des procédures qui s’offrent à lui et qui, selon lui, permettent de résoudre de façon la plus équitable, juste et rapide possible les instances.
- Le non-respect des règles ou l’exercice du pouvoir discrétionnaire ne sont pas des motifs pour infirmer une décision du TOAT sur une demande de révision judiciaire ou d’appel, sauf si le non-respect du TOAT ou l’exercice de son pouvoir discrétionnaire cause une violation importante nuisant à la décision définitive d’une instance.
- Les personnes qui ne sont pas des parties à une instance peuvent seulement déposer des demandes par écrit au TOAT.
- Le TOAT peut rejeter une instance sans audience si le Tribunal croit, entre autres, que l’instance n’a aucune chance raisonnable de succès.
Répercussions de la Loi et du Tribunal ontarien de l’aménagement du territoire
Dans le cas où une entreprise nécessiterait plusieurs approbations aux termes de différentes lois et provenant de divers tribunaux, la Loi instaure un nouveau processus pour traiter la jonction de plusieurs audiences. Avec ce nouveau processus, le Bureau de jonction des audiences n’est plus nécessaire. Auparavant, ce Bureau mettait sur pied une commission mixte pour trancher toutes les questions se rapportant à l’approbation d’une entreprise, et il a été aboli par l’abrogation de la Loi sur la jonction des audiences dans le cadre du Projet de loi 245.
Ces modifications peuvent rendre le processus d’aménagement du territoire plus efficace en créant un seul forum pour résoudre les questions et éliminer le dédoublement des différends.
Voici d’autres répercussions importantes de la Loi :
- Pouvoirs élargis pour rejeter une instance : La discrétion du TOAT pour rejeter une instance sans audience dans le cas où l’instance n’a « aucune chance raisonnable de succès » semble plus large que la discrétion conférée aux Anciens tribunaux. Par exemple, en vertu de la Loi sur l’aménagement du territoire, le TAAL ne pourrait rejeter une instance sans audience que si (i) les motifs dans l’avis d’appel ne sont pas suffisamment fondés en matière d’aménagement relatif à l’utilisation du sol pour justifier l’approbation ou le refus, (ii) l’appel n’est pas interjeté de bonne foi ou est frivole ou vexatoire, (iii) l’appel est interjeté uniquement en vue de retarder la procédure, ou (iv) la conduite de l’appelant constitue un abus de procédure. La discrétion du TE à cet égard était encore plus restreinte. Finalement, l’étendue de la discrétion du TOAT pour rejeter une instance dépendra de la façon dont cette discrétion est exercée par ses membres.
- Souplesse accrue pour certaines personnes : La discrétion du TOAT d’adopter des pratiques et des procédures qui s’offrent à lui et qui, selon lui, permettent de résoudre de façon la plus équitable, juste et rapide possible une instance offre une plus grande souplesse que celle donnée à de nombreux Anciens tribunaux, y compris le TE. Les processus d’audience pourront ainsi être plus efficaces dans certaines situations. Pour ceux qui sont habitués au TAAL, toutefois, dont la loi habilitante permet déjà de choisir parmi les pratiques et les procédures qui sont offertes celle qui serait la plus juste et rapide, la Loi constitue probablement plus un statu quo.
- Droits de participation réduits pour certaines personnes : Selon le TOAT, les participants (versus les parties) ne pourront généralement que présenter des observations écrites. La Loi stipule que « [s]auf disposition contraire de la présente loi ou de toute autre loi, la personne qui n’est pas partie à l’instance ne peut présenter au [TOAT] que des observations par écrit à l’égard de l’instance. » Ce qui est contraire au TE, dont les règles octroient divers droits relatifs à la preuve (comme agir à titre de témoin et donner un témoignage oral à l’audience) et des droits de demandes orales et écrites aux personnes se voient attribuer le statut de présentateur ou de participant. Selon le TOAT, les personnes qui voudraient porter en appel une décision portant sur l’environnement ne pourront plus être des présentateurs, et les mesures qu’elles pourront prendre en tant que participant à un appel seront limitées. Cela pourrait faire en sorte que les parties intéressées demandent au TOAT un statut de partie dans des affaires environnementales, afin d’obtenir les droits de participation auxquels elles étaient habituées. Des demandes de partie inappropriée, des retards et des complications dans les instances environnementales pourraient survenir.
- Expertise des membres : Il sera intéressant de voir la façon dont les membres seront nommés pour entendre des affaires en particulier. Du fait d’être membre de l’un des Anciens tribunaux, tout membre du TOAT a le pouvoir d’entendre des questions aux termes de la Loi qui confèrent au TOAT sa compétence. Il est juste de supposer que le président du TOAT tiendra compte de l’expertise des membres, ainsi que du désir de développer cette expertise, lorsqu’il nommera des membres à des audiences.
- Portail de soumission en ligne : Le TOAT a créé un nouveau portail de soumission de documents en ligne pour permettre la soumission de documents électroniques au TOAT. Ce qui contraste avec chaque Ancien tribunal, puisqu’aucun n’avait un tel portail.
Les personnes qui ont déjà travaillé avec le TAAL trouveront probablement que ces changements sont mineurs, même si certaines questions sont traitées différemment. Pour d’autres, tels que ceux qui ont travaillé seulement avec le TE, les changements peuvent être notables et exiger un temps d’adaptation au nouveau forum et à ses processus.
Remarque : Le TOAT a publié les Règles de pratique et de procédure [PDF] qui sont entrées en vigueur à la proclamation de la Loi le 1er juin. Ces nouvelles règles proviennent d’une ébauche publiée précédemment en janvier 2020, et ont été révisées en tenant compte des commentaires reçus lors d’une consultation publique.