Fusions et acquisitions par des sociétés étrangères : ce que les administrateurs doivent savoir

27 Juin 2018 8 MIN DE LECTURE

Vendre ou ne pas vendre : une décision aux enjeux considérables que la plupart des administrateurs de sociétés ouvertes doivent prendre au moins une fois au cours de leur carrière. Que le processus débute par une offre amicale ou hostile, les étapes suivies par les administrateurs et leur décision définitive seront, dans bien des cas, les actes qui seront examinés avec le plus d’attention.

Compte tenu de ces faits, Osler, de concert avec l’Institut des administrateurs de sociétés (ICD), a préparé à l’intention des administrateurs un sondage au sujet des fusions et des acquisitions, qui a été envoyé aux membres de l’ICD. L’ICD et Osler ont ensuite invité un groupe d’administrateurs de sociétés chevronnés à participer à une table ronde sur les leçons apprises, les tendances relevées dans le sondage, les comités spéciaux, le nouveau régime d’offres publiques d’achat, et plus encore. Le présent article résume certains des principaux points mis en lumière par le sondage et la table ronde.


Votre conseil d’administration est-il prêt pour une fusion ou une acquisition? 

Les deux tiers des administrateurs interrogés croient que l’expérience en fusions et acquisitions devrait constituer un point essentiel des compétences fonctionnelles exigées des membres d’un conseil d’administration. 

Dans l’ensemble, les participants à la table ronde ont convenu de la nécessité d’une planification préalable, ainsi que d’une révision périodique des mesures défensives et des processus établis pour attribuer les responsabilités et désigner les conseillers, une fois qu’une offre est reçue. Plusieurs ont également souligné qu’il ne faut jamais présumer que sa propre entreprise n’est pas une cible potentielle, mais ceux dont l’entreprise se situe dans un secteur qui dégringole ou dont l’évaluation est faible devraient être les plus vigilants.

Is your board M&A ready?

Réception d’une offre : que faut-il faire? 

La direction est ordinairement le premier point de contact des prétendants et des actionnaires, ce qui signifie que le chef de la direction peut habituellement contrôler le flux d’information destinée au conseil. Mais la direction a tout de même un intérêt direct dans toute éventuelle opération. Le conseil d’administration doit établir des lignes directrices relativement à ce qu’il doit recevoir et au moment opportun pour ce faire, ainsi qu’aux décisions qui nécessitent l’approbation du conseil.

Les administrateurs veulent être informés des offres d’acquisition. Plus de 53 % des répondants au sondage se sont dits d’avis que toutes les offres d’acquisition non sollicitées devraient être présentées au conseil. Une autre tranche de 42 % des répondants s’est montrée de cet avis, à moins que l’offre ne soit manifestement pas valable. 

Les deux principaux domaines dans lesquels les administrateurs s’attendent à avoir du soutien sont : l’établissement des avantages et des inconvénients de toute offre (89 %) et l’opinion de la direction sur ce qui est dans l’intérêt supérieur de l’entreprise (83 %). Même si la direction mène habituellement les négociations, les administrateurs qui ont pris part à la table ronde ont souligné l’importance de la participation du conseil.

Les décisions clés, pour les administrateurs, sont : l’approbation de l’approche générale du processus de vente, le contrôle de l’accès aux renseignements confidentiels, l’établissement de la réponse du conseil à une offre valable, et la prise de décision relative à la recommandation d’une vente et du moment pour y procéder.

Avez-vous besoin d’un comité spécial?

Les opinions divergent sur le recours à des comités spéciaux. Quelque 58 % des répondants au sondage ont dit qu’il faudrait mettre sur pied un comité spécial chaque fois que l’on reçoit une offre valable, alors que 23 % des répondants étaient d’avis qu’un comité spécial n’est pas toujours nécessaire. Et une proportion de 16 % des répondants ont dit qu’ils y recourraient uniquement si l’offre est valable et que la direction risque d’être en conflit d’intérêts.

Outre les circonstances dans lesquelles un comité spécial peut être exigé par la loi, les participants à la table ronde ont dit privilégier cette solution pour gérer des conflits d’intérêts avec la direction ou entre les membres du conseil. Ils ont également reconnu que la formation de comités spéciaux peut être justifiée lorsque certains administrateurs ont davantage de temps ou de compétences pour traiter certains processus de vente. Cependant, les soi-disant « comités de convenance » peuvent présenter certains inconvénients. Comme l’a dit l’un des participants à la table ronde : « En tant qu’administrateur, je ne souhaite pas déléguer à d’autres administrateurs la plus grande décision que le conseil aura à prendre. »


Obtenir des avis externes

Plus de 90 % des administrateurs interrogés ont convenu qu’un conseil d’administration peut se contenter de simplement refuser une offre valable qu’il ne croit pas être dans l’intérêt supérieur de l’entreprise. Les administrateurs qui ont participé à la table ronde se disaient à l’aise de prendre cette décision sans obtenir d’avis externe, à moins que le prix de l’offre se situe en « zone grise ». Ils s’adresseraient alors à un expert en évaluation. « Il faut alors se poser, et être vus à se poser, les bonnes questions », a répondu un administrateur.

Seeking external advice - rejected

De nombreux répondants au sondage (72 %) penchent en faveur du recours à des banques d’investissement lorsqu’il s’agit d’intégrer d’autres initiateurs au processus. Les administrateurs qui ont pris part à la table ronde ont convenu qu’il était essentiel d’obtenir l’avis de conseillers juridiques chevronnés en fusions et acquisitions, et qu’un conseiller externe indépendant constitue un atout lorsque la direction se trouve en conflit d’intérêts.

Seeking external advice - rejected

Communiquer avec les actionnaires

Ultimement, ce sont les actionnaires qui décideront si la vente sera conclue. L’engagement des actionnaires peut poser un défi si l’annonce publique d’une offre entraîne des fluctuations rapides dans l’actionnariat d’une entreprise, alors que des spéculateurs à court terme font leur apparition. Le conseil doit être au courant des changements de position des actionnaires pour décider de la façon de communiquer son opinion sur une offre. 


Nouveau régime d’offres publiques d’achat

Depuis l’adoption, en mai 2016, du nouveau régime d’offres publiques d’achat qui exige une période minimale de dépôt de 105 jours (à moins que la cible ne conclue une opération de remplacement ou que le conseil de la société cible n’accepte une période minimale de dépôt plus courte), la question de savoir si cette période accordée aux conseils ciblés pour répondre aux offres hostiles est d’une longueur appropriée. Aux termes de l’ancien régime, alors que la période minimale de dépôt n’était que de 35 jours, les conseils des entreprises ciblées, pour gagner du temps, adoptaient un régime de droits des actionnaires, ou une « pilule empoisonnée », c’est-à-dire une disposition qui pourrait diluer la participation de l’acheteur dans la société ciblée. Ces « pilules empoisonnées » faisaient habituellement l’objet d’une interdiction d’opérations après 45 à 70 jours. L’un des participants à la table ronde a dit qu’« autrefois, c’était la course et l’on risquait de ne pas obtenir la valeur maximale pour les actionnaires ». 

Bien que 62 % des répondants au sondage conviennent que les intérêts des investisseurs à court terme jouent un trop grand rôle dans la détermination des résultats des opérations d’acquisition, près de 70 % des répondants sont d’avis que le nouveau régime d’offres publiques d’achat de 105 jours présente un équilibre suffisant contre les pressions exercées par les investisseurs à court terme.

Conclusion

Le sondage et la table ronde viennent confirmer que les opérations de fusion et acquisition posent un certain nombre de défis exceptionnels pour les administrateurs. Les conseils d’administration de toutes les sociétés ouvertes doivent s’assurer que, collectivement, ils ont l’expérience et les compétences, ainsi que l’accès aux ressources et au soutien nécessaires pour réagir avec efficacité, advenant une vente éventuelle.