Federal Court of Appeal holds Canada Revenue Agency does not have the power to compel oral interviews during audit

4 Avr 2019 7 MIN DE LECTURE

L’Agence du revenu Canada (ARC) a de plus en plus demandé des entrevues orales dans le cadre des vérifications, notamment dans les vérifications liées aux prix de transfert. Dans la cause Ministère du Revenu national c. Cameco Corporation, l’ARC demandait une ordonnance obligeant les employés du groupe Cameco à participer à des entrevues orales. La décision de la Cour fédérale d’appel (CFA) sera bien accueillie par les contribuables, car elle maintient qu’un vérificateur n’a pas le pouvoir d’imposer de telles entrevues. 

Demande d’entrevues par l’ARC

Pour l’aider à effectuer une analyse fonctionnelle dans le cadre d’une vérification de prix de transfert, l’ARC a demandé des entrevues orales auprès de plus de 25 personnes employées par le groupe Cameco (y compris des employés de filiales non canadiennes). Cameco, représentée par Osler, a refusé la demande d’entrevues, soutenant que l’ARC n’avait pas le pouvoir d’obliger les employés à participer à des entrevues, mais a offert de répondre à des questions écrites. 

L’ARC a demandé une ordonnance exécutoire en vertu de l’article 231.7 de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la Loi), soutenant que Cameco ne fournissait pas l’aide prévue par l’alinéa 231.1(1)a) de la Loi.

L’ARC a fait valoir que les pouvoirs généraux prévus à l’alinéa 231.1(1)a) d’« inspecter, vérifier ou examiner » les livres et registres d’un contribuable sont larges et englobent la capacité d’obliger à répondre oralement à des questions. L’ARC alléguait que son interprétation était conforme au but de la disposition visant à vérifier les renseignements sur les contribuables et à assurer la conformité avec la Loi, de même qu’avec l’intérêt public général en soutenant un régime fiscal d’autocotisation.

En arrière-plan, l’appel de Cameco en matière de prix de transfert devant la Cour canadienne de l’impôt (Cour de l’impôt) portant sur les mêmes questions de prix de transfert pour des années d’imposition antérieures était en instance. (Pour en savoir plus sur l’appel de Cameco qui a eu gain de cause devant la Cour de l’impôt, voir la rétrospective de l’année juridique 2018 sur le site d’Osler : Le contribuable l’emporte dans un différend historique portant sur les prix de transfert.) Cameco craignait que la demande d’entrevues orales par l’ARC cause un préjudice à son appel devant la Cour de l’impôt.     

La CFA ne reconnaît pas le pouvoir d’imposer des entrevues orales

La Cour fédérale a rejeté la demande d’ordonnance présentée par l’ARC et celle-ci en a appelé devant la CFA. 

La CFA (motifs rédigés par le juge Rennie et partagés par le juge Laskin) a débouté l’appel de l’ARC et déterminé que les pouvoirs généraux d’« inspecter, vérifier ou examiner » les livres et registres d’un contribuable ne s’étendaient pas à obliger un contribuable à se soumettre à des entrevues orales. 

La CFA a fait remarquer que le texte de la Loi est axé sur la capacité de l’ARC d’accéder aux renseignements dans les livres et dossiers du contribuable et que rien dans le texte n’indique le pouvoir d’obliger quelqu’un à répondre à des questions orales. La CFA a étayé cette interprétation du texte en faisant remarquer que dans d’autres lois où le Parlement entendait obliger quelqu’un à fournir des réponses orales à une demande de renseignements du gouvernement, il l’a fait de façon explicite. 

La CFA a cité ses conclusions passées dans la cause BP Canada, indiquant que les pouvoirs de vérification de l’ARC ne s’étendaient pas à « contraindre les contribuables à révéler leurs « points faibles ». (Pour en savoir plus sur la représentation de BP Canada par Osler, voir notre article « La Cour d’appel fédérale refuse l’accès systématique aux documents de travail sur l’impôt couru à l’ARC ».)

Tout en convenant qu’il est important que l’ARC puisse vérifier les renseignements dans le contexte d’un régime fiscal d’autocotisation, la CFA a déterminé qu’un tel but ne peut remplacer la formulation décidée par le Parlement. La CFA a ajouté que l’ARC a d’autres pouvoirs d’enquête pour obtenir des renseignements relatifs à un contribuable (par exemple, demander des renseignements auprès de tiers et autoriser une demande de renseignements officielle). La CFA a indiqué qu’elle n’exprimait pas une opinion sur le fait que ces autres pouvoirs sont suffisants ou non, au point où l’ARC n’ait pas besoin du pouvoir d’imposer des réponses orales pendant une vérification; les modifications nécessaires pour conférer un tel pouvoir étaient une question de politique qui relève du Parlement. 

La CFA a également indiqué que l’histoire législative de l’alinéa 231.1(1)a) lève tout doute possible sur la portée de cette disposition. La disposition précédente utilisait le mot « oralement » en rapport avec le devoir de répondre à toutes les questions appropriées relatives à une vérification et offrait à l’ARC la possibilité de demander à un contribuable de répondre sous serment. Le retrait de ces termes dans la version actuelle de la disposition est éloquent.       

L’ARC dépasse les limites

La juge Woods a rédigé un jugement distinct concordant avec le résultat, mais invoquant des motifs différents. Bien que la juge Woods estimait qu’il n’était pas nécessaire de prendre en compte la portée des pouvoirs de vérification de l’ARC en général, elle ne constatait aucune erreur susceptible de révision dans la décision de la cour fédérale de rejeter la demande de l’ARC. En particulier, elle a indiqué que la cour fédérale s’appuyait sur quatre faits « uniques et incontournables » [traduction] : la question des prix de transfert portait sur plusieurs années d’imposition; les « mains propres » de Cameco qui s’était conformée à toutes les demandes, y compris avoir accepté volontairement des entrevues orales pour des années précédentes; le grand nombre d’entrevues demandées et l’offre de Cameco de répondre à des questions écrites; et le litige en instance devant la Cour de l’impôt. Bien que le juge Rennie n’estimait pas que ces éléments devaient être pris en compte, la juge Woods était convaincue que ces faits étaient pertinents dans l’exercice de la discrétion de la cour fédérale pour décider d’émettre une ordonnance ou non. La juge Woods a conclu que les faits « soutenaient amplement que la demande du Ministre dépassait les limites » [traduction] et que la cour fédérale n’avait commis aucune erreur susceptible de révision en rejetant la demande de l’ARC.    

La décision de la CFA sera bien accueillie par les contribuables. Il reste à voir comment l’ARC réagira à cette décision. 

Pour en savoir plus sur la décision ou sur l’assistance d’Osler au cours d’une vérification, veuillez communiquer avec l’auteur ci-dessus ou avec un membre de notre groupe national de droit fiscal.