Auteurs(trice)
Associé, Droit des sociétés, Toronto
Associé, Droit des sociétés, Toronto
À la suite de la mise en œuvre du nouveau Programme de dénonciation de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) en juillet 2016, qui comprend un incitatif financier pour les dénonciateurs en Ontario, le gouvernement de l’Ontario a approuvé des modifications à la Loi sur les valeurs mobilières (Ontario) (la « Loi ») afin d’assurer une protection supplémentaire aux personnes qui signalent une violation possible des dispositions législatives ou des règlements administratifs en matière de valeurs mobilières, ou encore d’un autre instrument d’un organisme d’autoréglementation de l’Ontario. Ces modifications sont entrées en vigueur le 28 juin 2016.
Les protections supplémentaires offertes par ces modifications sont : 1) l’interdiction d’exercer des représailles contre des dénonciateurs (la « disposition anti-représailles »); 2) l’interdiction d’établir des restrictions contractuelles contre le signalement de violations potentielles (la « disposition anti-confidentialité »).
La disposition anti-représailles interdit à toute personne ou à toute compagnie (ou personne agissant en leur nom) d’exercer des représailles contre un employé de cette personne ou de cette compagnie parce que, selon le cas :
a) il a fourni des renseignements, a exprimé l’intention de fournir des renseignements ou a demandé des conseils quant à la fourniture de renseignements à la CVMO, à un organisme d’autoréglementation reconnu ou à un organisme d’exécution de la loi (les organismes de réglementation), ou encore à la personne ou à la compagnie (ou à une personne agissant en leur nom) au sujet d’un acte que la personne ou la compagnie (ou la personne agissant en leur nom) dont il a des motifs raisonnables de croire qu’il est contraire au droit ontarien des valeurs mobilières ou à un règlement administratif ou autre instrument réglementaire d’un organisme d’autoréglementation reconnu (collectivement, les « renseignements pertinents »);
b) relativement aux renseignements fournis du type décrit ci-dessus, il a collaboré, témoigné ou aidé d’une autre façon (ou exprimé l’intention de le faire) dans le cadre d’une enquête d’un organisme de réglementation ou à une instance de la Commission ou d’un organisme d’autoréglementation reconnu ou une instance judiciaire (collectivement, les « procédures pertinentes »).
La disposition anti-représailles définit les représailles comme toute mesure prise contre un employé qui nuit à son emploi, notamment faire ou menacer de faire ce qui suit :
a) mettre fin à son emploi;
b) le rétrograder, lui imposer une mesure disciplinaire ou le suspendre;
c) prendre des sanctions à son égard;
d) l’intimider ou le contraindre à l’égard de son emploi.
La disposition anti-représailles protège les employés contre les représailles pour un plus large éventail de lignes de conduite visées tant par les dispositions correspondantes du Code criminel du Canada, qui ne s’appliquent qu’aux représailles de la part de l’employeur (ou de la personne qui agit au nom de l’employeur ou qui est en situation d’autorité par rapport à un employé de l’employeur) qui sont exercées avec l’intention de forcer l’employé à ne pas fournir des renseignements ou avec l’intention d’exercer des représailles contre l’employé au motif qu’il a fourni des renseignements, que par les dispositions de la Loi Dodd-Frank qui interdit les représailles pour les actes posés à un stade relativement plus avancé des procédures, tels qu’un acte licite posé par le dénonciateur en fournissant des renseignements à la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis, en commençant à témoigner ou en collaborant à une enquête ou une action judiciaire ou administrative de la SEC fondée sur ces renseignements ou relative à ceux-ci, ou en faisant des divulgations exigées ou protégées par certaines lois sur les valeurs mobilières des États-Unis. Il faut cependant noter que la disposition anti-représailles (tout comme les dispositions du Code criminel et de la Loi Dodd-Frank) ne s’applique qu’aux employés de la personne ou de la compagnie concernée, et qu’elle ne semble pas offrir de protection aux administrateurs, aux consultants ou à d’autres personnes n’ayant aucune relation d’employé-employeur avec cette personne ou cette compagnie.
La disposition anti-confidentialité prescrit que toute disposition d’une entente, y compris une entente de confidentialité, entre une personne ou une compagnie et un employé de la personne ou de la compagnie est nulle dans la mesure où elle empêche ou vise à empêcher l’employé de faire une dénonciation, que ce soit en fournissant des renseignements pertinents à un organisme de réglementation, ou en collaborant, en témoignant ou en aidant d’une autre façon dans le cadre d’une instance pertinente (ou en exprimant son intention de le faire). Il faut souligner que, même si la disposition anti-confidentialité rend nulle une disposition relative à la confidentialité dans la mesure où elle empêche la divulgation, l’approche des États-Unis diffère quelque peu, car aux États-Unis, faire obstacle à la divulgation constitue une violation des lois sur les valeurs mobilières (y compris par l’utilisation d’un libellé trop général en matière de confidentialité). L’an dernier, la SEC a pris ses premières mesures d’application contre un émetteur qui a tenté de « museler » des dénonciateurs. En l’espèce, KBR, Inc., société internationale d’ingénierie et de technologie établie à Houston, a été sanctionnée pour avoir libellé de façon trop restrictive les dispositions de ses ententes de confidentialité avec ses ex-employés, même si la SEC n’a pas conclu que KBR avait effectivement empêché les dénonciateurs de parler aux enquêteurs de la SEC. On ignore encore si des procédures d’application semblables fondées sur la nouvelle disposition anti-confidentialité de l’Ontario seraient possibles, car l’approche de l’Ontario en matière de restrictions contractuelles relatives à la divulgation aux organismes de réglementation des valeurs mobilières diffère grandement de celle de la SEC.
Le texte intégral de ces modifications figure à l’article 3 de l’Annexe 26 du Projet de loi 173, Loi de 2016 favorisant la création d'emplois pour aujourd'hui et demain (mesures budgétaires).