Décisions marquantes en Alberta et en Colombie-Britannique

19 Avr 2018 4 MIN DE LECTURE

Bien que la jurisprudence récente en Alberta et en Colombie-Britannique soit résolument en faveur des franchiseurs, elle met en lumière le fait qu’on doive prendre des précautions pour i) rédiger des contrats clairs et précis et ii) agir de façon équitable envers les franchisés. Les décisions décrites ci-dessous constituent une évolution marquante dans la défense contre les allégations de contrainte et la responsabilité du fait d’autrui pour la conduite des franchisés principaux.

L’allégation de contrainte du franchisé a été rejetée

Dans la décision Dairy Queen Canada, Inc v MY Sundae Inc, 2017 BCCA 442, le franchiseur s’inquiétait du fait que le franchisé ne maintenait pas certaines normes de qualité. Le franchiseur avait le droit de résilier la convention si les problèmes n’étaient pas réglés dans les sept jours. Cependant, il a accordé au franchisé 60 jours, au cours desquels le franchisé n’a pas réglé les problèmes. Les parties ont ensuite conclu une entente mutuelle de résiliation et de décharge (la décharge), qui prévoyait que, même si la convention de franchisage pouvait être résiliée sur-le-champ, le franchisé disposerait de six mois pour vendre l’entreprise à un acheteur approuvé. L’entreprise n’a jamais été vendue, et les parties ont engagé des procédures.

Au procès, le franchisé a contesté la validité de la décharge, alléguant qu’elle avait été signée sous la contrainte. Le juge a conclu que la décharge était valide et exécutoire, en partie parce que le franchisé était pleinement informé de son contenu et de ses conséquences.

La Cour d’appel a rejeté l’appel, soulignant que le franchisé avait eu amplement le temps d’obtenir des conseils juridiques, de comprendre la décharge et de signer une attestation écrite de fermeture du restaurant. La Cour d’appel souscrivait à l’opinion du juge de première instance, selon laquelle l’octroi de temps supplémentaire pour vendre l’entreprise en échange de la décharge constituait une pression commerciale légitime, et non une contrainte.

Les allégations de contrainte ne sont accueillies que lorsqu’elles sont étayées par des faits. Cette décision vient renforcer l’importance i) de consigner soigneusement tous les événements et les communications avec les franchisés, plus particulièrement dans un contexte de résiliation; ii) de documenter toutes les prolongations de délais; iii) de rédiger des conditions claires; iv) de recommander que le franchisé obtienne un avis juridique indépendant et qu’il dispose de suffisamment de temps pour ce faire.

Responsabilité du fait d’autrui pour les actes d’un franchisé principal

Dans la décision 1738937 Alberta Ltd v Fair Waves Coffee Inc (Waves Coffee House), 2017 ABQB 714, la Cour n’a pas tenu responsable le franchiseur des actes frauduleux du franchisé principal.

Les demandeurs avaient conclu une convention de franchisage avec Abrahim Alhusin, principal franchisé de Fair Waves Coffee en Alberta. Les demandeurs avaient versé 225 000 $ en frais de construction à Alhusin, qui s’est enfui avec les fonds. La franchise n’a jamais ouvert ses portes. Les demandeurs ont poursuivi le franchiseur, Fair Waves, alléguant qu’il devrait être tenu responsable du fait d’autrui pour les actes d’Alhusin.

La Cour a rejeté la demande à l’encontre de Fair Waves, au motif que la preuve ne soutenait pas l’allégation selon laquelle M&M et Alhusin étaient des mandataires de Fair Waves. Plus particulièrement, i) un paiement a été effectué à M&M, et ii) la communication précisait clairement que la franchise était offerte par M&M et iii) que le franchisé pouvait poursuivre M&M, mais non Fair Waves.

Pour éviter la responsabilité du fait d’autrui dans des situations semblables, les franchiseurs devraient faire attention à la façon dont ils présentent leur relation avec les franchiseurs principaux aux sous-franchisés et à la communauté élargie, et prendre, au minimum, les mesures qui suivent :

  • indiquer clairement, dans les documents de divulgation, que le franchiseur et le franchisé principal ont des exploitations distinctes;
  • éviter les libellés qui peuvent donner l’impression que le franchiseur et le franchisé principal font équipe ou qu’ils entretiennent une relation mandant-mandataire;
  • avoir des coordonnées distinctes pour le franchiseur et le principal franchisé.

Il importe de souligner que cette décision portait sur les conditions de la convention pertinente et sur les faits en l’espèce; certains faits peuvent être cruciaux dans la détermination des résultats. Par exemple, en l’espèce, la Cour a tenu compte du fait que les demandeurs étaient des franchisés expérimentés. Par conséquent, les mesures susmentionnées sont d’autant plus importantes lorsqu’il s’agit de traiter avec des franchisés moins expérimentés.