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La CVMO conclut une entente réglant des allégations concernant un cryptojeton

3 Juil 2024 6 MIN DE LECTURE

Le 26 janvier 2024, le Tribunal des marchés financiers de l’Ontario (le Tribunal) a approuvé une entente [PDF; en anglais seulement] dans l’affaire intéressant Nicholas Agar et Paul Ungerman (les intimés). C’est la première fois que la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) conclut une entente réglant des allégations liées à la promotion et à la vente d’un cryptojeton.

Bien que le Tribunal ait clairement indiqué qu’il ne se prononçait pas sur la question de savoir si le cryptojeton constituait une valeur mobilière, cette affaire souligne l’engagement de la CVMO à appliquer la Loi sur les valeurs mobilières (la Loi) à l’égard des cryptoactifs, même si le statut de ces actifs en vertu de la Loi demeure incertain.

Le contexte

Comme c’est généralement le cas avec les ententes de règlement conclues avec la CVMO, les parties ont soumis leur entente au Tribunal sur la base d’un ensemble de faits convenus, notamment qu’entre 2018 et 2022, les intimés et les entités qu’ils contrôlaient (les entités Axia) ont vendu le cryptojeton qu’ils avaient créé (le jeton Axia) auprès d’investisseurs du monde entier, ce qui leur a permis de lever environ 41 millions de dollars américains, dont une tranche de 9 millions de dollars américains auprès de plus de 200 investisseurs de l’Ontario (le projet Axia). Les intimés ont vendu des jetons Axia et/ou des droits de souscription de jetons Axia à des investisseurs ontariens de diverses manières. Le projet Axia a d’abord été dirigé par une société ontarienne contrôlée par les intimés avant d’être transféré à l’étranger en 2019.

Les intimés ont diffusé continuellement du matériel faisant la promotion du jeton Axia et ont activement promu sa rentabilité, y compris au moyen d’affirmations sur sa « jetonomie » (tokenomics) exceptionnelle qui, selon eux, procurait un « lieu sûr » (safe haven) aux acheteurs et augmentait la valeur du jeton Axia au fil du temps. Les intimés ont également affirmé que le jeton Axia disposait d’une prétendue réserve d’actifs de 29 milliards de dollars américains, qu’il constituait la première cryptomonnaie mondiale soutenue ou adossée à des actifs et qu’il serait négociable sur une plateforme de négociation devant être bâtie sur leur réseau. À l’époque, le jeton Axia était négocié sur des bourses tierces, avec la promesse d’être inscrit à la cote d’autres bourses.

En octobre 2022, les intimés ont annoncé la suspension de toutes les opérations de vente visant le jeton Axia. En mars 2023, ils ont annoncé le début des efforts de liquidation du projet Axia. Dans le cadre de cette liquidation, il restait à distribuer aux investisseurs moins de 10 millions de dollars américains sur les 41 millions de dollars américains qui avaient été levés.

L’entente de règlement

Le 10 janvier 2024, le personnel de la CVMO a publié un exposé des allégations selon lesquelles les intimés avaient violé la Loi à divers égards dans le cadre du projet Axia et qu’ils avaient induit le personnel en erreur au cours de son enquête sur cette affaire. Le même jour, les parties ont conclu une entente de règlement [PDF; en anglais seulement].

Dans l’entente, les intimés ont reconnu et admis qu’eux-mêmes et les entités Axia, le cas échéant, avaient : i) fait des déclarations trompeuses ou erronées en contravention du paragraphe 126.2 (1) de la Loi, ii) violé les exigences en matière d’inscription et de prospectus prévues au paragraphe 25 (1) et à l’article 53 de la Loi, iii) fait un certain nombre de déclarations trompeuses, incomplètes ou erronées au personnel de la CVMO au sujet de la nature et de l’étendue des activités commerciales liées au projet Axia en contravention de l’alinéa 122 (1) a) de la Loi, iv) autorisé ou permis le manquement des entités Axia ou acquiescé à ce manquement en contravention de l’article 129.2 de la Loi, et v) adopté une conduite contraire à l’intérêt public.

Les parties ont convenu de ce qui suit :

  • le jeton Axia constitue une valeur mobilière;
  • les intimés et les entités Axia se sont livrés au placement d’une valeur mobilière sans déposer de prospectus provisoire ou de prospectus et sans se prévaloir d’une dispense applicable de l’obligation de déposer un prospectus;
  • les intimés et les entités Axia ont exercé et se sont présentés comme exerçant les activités commerciales qui consistent à effectuer des opérations sur valeurs mobilières sans être inscrits à ce titre et sans se prévaloir d’une dispense applicable de l’obligation de s’inscrire à ce titre.

Chacun des intimés a accepté de payer une sanction administrative de 550 000 $ à la CVMO, ainsi que de remettre certains montants et de contribuer aux frais de l’enquête du personnel. Ils ont également accepté des interdictions à vie d’effectuer des opérations sur valeurs mobilières et d’occuper des fonctions de dirigeant ou d’administrateur.

Les motifs d’approbation du Tribunal

Le Tribunal a approuvé le règlement, car il a estimé que les modalités de l’entente s’inscrivaient dans l’éventail d’issues raisonnables en toutes les circonstances et que l’entente reflétait adéquatement les principes qui sous-tendent l’application des sanctions, y compris la reconnaissance de la gravité de l’inconduite et l’importance de favoriser la protection des investisseurs et la confiance dans les marchés financiers.

Pour parvenir à cette conclusion, le Tribunal a noté la nouveauté de l’affaire, notamment le fait que c’était la première fois que la CVMO concluait une entente réglant des allégations liées à la promotion et à la vente d’un cryptojeton et que le Tribunal n’avait jamais statué sur des questions contestées liées à la promotion et à la vente d’un cryptojeton ou aux circonstances dans lesquelles il pouvait être considéré comme une valeur mobilière. Dans le cadre de l’entente de règlement, les parties ont convenu que le jeton constituait une valeur mobilière. La formation a noté qu’elle n’avait pas eu l’occasion d’argumenter sur les caractéristiques du jeton et sur la question de savoir s’il constituait effectivement une valeur mobilière. Néanmoins, elle a estimé que les parties avaient [traduction libre] « admis et accepté les circonstances qui justifiaient » l’imposition des sanctions convenues.

Principaux points à retenir

Bien qu’il reste à voir quelle sera son incidence sur les futures enquêtes de la CVMO et les futures décisions du Tribunal concernant les cryptojetons, le règlement renforce néanmoins le sérieux avec lequel la CVMO traitera les contraventions aux lois sur les valeurs mobilières de l’Ontario dans le contexte des cryptomonnaies et leur mise en application, indépendamment du lieu de domiciliation des entreprises.